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L’entreprise peut-elle prêter de l’argent au dirigeant ?

Publié le mardi 2 novembre 2021 à 09h01
Par Marion Perrier, Accroche-press’ pour France Défi
Experts & Décideurs Chef d'entreprise Patrimoine L’entreprise peut-elle prêter de l’argent au dirigeant ?

Prêter de l’argent au dirigeant, une possibilité pour l’entreprise ? Attention, le Code de commerce interdit au dirigeant de devoir de l’argent à sa société et les sanctions peuvent être conséquentes.

Besoin d’argent pour un projet personnel ? Il peut être tentant pour le dirigeant d’emprunter les fonds à son entreprise lorsqu’elle dispose de liquidités. Mais l’opération est à proscrire. « C’est un principe général, le dirigeant ne peut pas devoir d’argent à sa société », souligne Pierre Tourrette, expert-comptable chez Innoliance, membre du groupement France Défi. Le Code de commerce interdit en effet le fait pour les gérants ou les associés autres que les personnes morales de contracter un emprunt auprès de leur société.

Prêter de l’argent au dirigeant, un risque d’abus de bien social

« Cela peut être caractéristique d’un délit d’abus de bien social », poursuit le spécialiste. Plusieurs conditions doivent néanmoins être réunies pour qu’une telle qualification soit retenue. « Il faut que l’entreprise soit une société à responsabilité limitée, une SARL ou une SA, que l’emprunt ait été fait par le dirigeant, que l’argent ne soit pas utilisé dans l’intérêt de la société et que le dirigeant ait réalisé l’opération en conscience, de manière intentionnelle », explique Pierre Tourrette. Dans un tel cas, les sanctions peuvent être lourdes pour le dirigeant qui encourt une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 375 000 € d’amende.

Il demeure en revanche possible pour le dirigeant associé de récupérer les sommes présentes sur son compte courant d’associé, qu’elles soient le fruit d’un apport réalisé en amont ou résultent d’un salaire auquel le chef d’entreprise aurait auparavant renoncé. Mais cela n’est autorisé que si le compte est créditeur.

Le compte courant d’associé ne peut pas être débiteur. Il fonctionne un peu comme un dépôt à vue à la banque, sans découvert autorisé

Pierre Tourrette, expert-comptable chez Innoliance

Là encore, le fait de faire passer son compte courant d’associé en négatif peut être constitutif d’un abus de bien social.

Salaire ou dividendes ?

Si un versement est effectué par la société au dirigeant, celui-ci doit être traité comme un salaire. « Les rémunérations du dirigeant doivent être approuvées en assemblée générale et le montant concerné intègre ensuite la base de son impôt sur le revenu et doit donner lieu au versement de cotisations », rappelle Pierre Tourrette.

 

Une autre solution réside dans le versement de dividendes surtout lorsque le dirigeant détient la majorité des actions ou des parts sociales (la somme totale des dividendes étant répartie au prorata du capital détenu). Ce versement doit également être décidé en amont par l’assemblée générale. Une formalité lorsque le dirigeant est associé majoritaire, mais qui ne l’exonère pas du respect des règles de convocation et de tenue de cette assemblée.

Une étude personnalisée

Ces dividendes sont taxés non comme des salaires mais comme les revenus de capitaux mobiliers, aujourd’hui via la flat tax de 30 % avec la possibilité d’opter pour le barème de l’impôt sur le revenu. « Dans les SAS et SA, les dividendes ne sont pas soumis aux charges sociales. C’est également vrai dans les SARL dans la limite d’un seuil de 10 % du capital social au-delà duquel les dividendes doivent être intégrés aux bases de cotisations sociales TNS des bénéficiaires concernés. Au-delà de cette limite, ces distributions sont considérées aux yeux du législateur comme des compléments de rémunérations », précise le spécialiste.

Entre les deux options – salaire ou dividendes – difficile de déterminer laquelle est la plus avantageuse dans l’absolu. « Cela dépend de nombreux éléments comme la situation familiale et patrimoniale du dirigeant, sa santé ou sa volonté à un moment donné de cotiser davantage pour la retraite par exemple. Cette décision doit faire l’objet d’une étude personnalisée », préconise Pierre Tourrette. Il importe donc de se rapprocher de son expert-comptable pour identifier la stratégie la plus pertinente.