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Agression physique entre salariés : ce que dit la loi

Publié le lundi 18 février 2019 à 08h24
Par Marion Perrier, Accroche-press’ pour France Défi
Experts & Décideurs Vie de l’entreprise Juridique Agression physique entre salariés : ce que dit la loi

Une agression physique entre salariés peut arriver. Face à cette situation délicate, l’employeur doit savoir réagir.

Deux salariés qui en viennent aux mains, des coups portés par un collaborateur à un autre ou des objets lancés à sa figure… la question des violences en entreprise est un sujet épineux auquel l’employeur peut être confronté.

Agression physique entre salariés : déclarer un accident du travail

Si un salarié est blessé, il faut d’abord s’assurer qu’il voit un médecin pour être soigné et faire constater ses lésions. L’agression ayant eu lieu dans l’entreprise, cela doit être déclaré comme un accident de travail. La victime peut porter plainte contre son agresseur qui encoure alors des sanctions pénales. Il s’agit d’amendes de 750 € à 3000 € pour les violences n’ayant occasionné aucune interruption temporaire de travail (ITT) ou une ITT inférieure à 8 jours. Au-delà de 8 jours d’ITT, la sanction peut atteindre 45 000 € d’amende et 3 ans de prison puis 160 000 € et dix ans d’emprisonnement si les violences ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente.

De son côté, l’entreprise peut prendre des mesures disciplinaires. Mais auparavant, il faut s’assurer de disposer d’un maximum d’informations. « Il faut que l’entreprise ait toutes les cartes en main pour déterminer si les faits sont établis et à qui ils sont imputables. Cela suppose de recueillir des témoignages, en tenant compte du fait que les récits peuvent varier selon les personnes qui y mettent naturellement de l’affect et de l’interprétation, et s’assurer de connaître les circonstances dans lesquelles l’accident a eu lieu », souligne Maître Anne Pitault, avocat directeur du cabinet Cornet Vincent Ségurel.

Agression physique entre salariés : quelles sanctions disciplinaires ?

En attendant de faire la lumière sur les événements, il est possible de mettre à pied les salariés impliqués à titre conservatoire. Différentes sanctions sont ensuite envisageables comme un licenciement pour cause réelle et sérieuse ou à un licenciement pour faute grave, sans préavis et privatif d’indemnité de licenciement et d’indemnité compensatrice de préavis. Le licenciement pour faute lourde est plus rare car cela suppose l’intention de nuire à l’employeur et à l’entreprise, ce qui est difficile à démontrer.

Un avertissement ou une mise à pied disciplinaire de quelques jours constituent des sanctions alternatives.

Toutefois, il est compliqué de conserver l’agresseur dans ses effectifs car les autres collaborateurs ont peur et l’employeur est tenu à une obligation de sécurité vis-vis de ses salariés. Il doit prendre les mesures qui s’imposent pour les protéger

Anne Pitault

Dans tous les cas, il importe de respecter scrupuleusement la procédure disciplinaire. L’employeur a deux mois à compter de sa connaissance des faits pour prendre des sanctions. Le salarié doit d’abord être convoqué à un entretien préalable, auquel il peut se faire accompagner, afin de lui exposer les griefs qui lui sont reprochés et de l’entendre. La sanction doit lui être notifiée dans un second temps. S’il est licencié pour faute grave et décide de contester ce motif, ce sera aux juges des prud’hommes d’apprécier les faits et leur gravité. D’où l’importance de recueillir des éléments de preuve sur l’agression et son contexte.

Mettre en place des outils de prévention

Au-delà de la nécessaire réaction lorsque survient une agression physique, la prévention de ce type d’événement se joue au quotidien par exemple en mettant en place des formations aux techniques de communication, au travail en équipe, ou en portant attention au management. Le risque est sinon de voir la responsabilité de l’entreprise engagée par un salarié agressé. « Il peut chercher à faire reconnaître sa faute inexcusable  en démontrant qu’il a été victime d’un accident du travail et que celui-ci est imputable à son employeur qui n’aurait pas tout mis en œuvre pour l’éviter », explique Anne Pitault.

La vigilance est d’autant plus importante que les agressions sont rarement le fait d’employés modèles victimes d’un coup de sang. « En général, les auteurs n’en sont pas à leur coup d’essai et l’altercation est plutôt le reflet d’un conflit latent, le point paroxystique d’une situation délétère », constate l’avocate.