Il n’est pas toujours facile de recadrer et d’adresser un reproche à un collaborateur. Pourtant, c’est aussi le rôle du manager. Car il ne peut laisser une situation se dégrader sans risquer que cela soit préjudiciable pour l’entreprise. Voici quelques clés pour rendre cet exercice forcé constructif.
C’est rarement un moment très agréable. « Et souvent, il est tentant de privilégier l’évitement… », confirme la coach Aude Tixier, fondatrice du cabinet Thomine et associés. Mais n’est-ce pas le rôle d’un manager de dire ce qui ne va pas sans tarder ? « Surtout qu’un reproche n’exclut pas la bienveillance ni l’exigence, insiste-t-elle. D’ailleurs, un reproche peut être formulé, justement, dans l’idée que les deux interlocuteurs soient gagnants, en ouvrant des pistes. Dans une organisation, ce qui est riche, c’est de se faire grandir mutuellement. »
Première étape : établir, seul, son ressenti
Plusieurs grains de sable peuvent gripper une relation professionnelle entre deux personnes. Il peut s’agir d’une erreur ponctuelle ou d’une faiblesse. Parfois, c’est une question d’attitude, comme un ton employé, des retards répétés… « La première étape, pour le manager, est de se connecter avec ses émotions, poursuit l’experte. Que ressens-je face à la situation rencontrée et pour quelles raisons ? » Il y a ainsi des reproches qui peuvent être évacués par une première introspection : le sentiment d’énervement est peut-être exagéré ou exacerbé par un contexte. « Mais s’il y a une critique à formuler, il faut recadrer le salarié de façon constructive, ce que permet notamment le DESC (NDLR : décrire, exprimer, spécifier, conclure). » Cette méthode, née aux États-Unis en 1976, repose sur quatre actions à mettre en place pour gérer les conflits.
Décrire sans jugement de valeur
La première étape consiste à exposer des faits concrets. « Il s’agit d’établir poliment, de la façon la plus neutre possible, les éléments qui posent problème », explique Aude Tixier. Celle-ci donne un exemple simple, comme des retards répétés. L’intéressé dira alors factuellement : « Tu es encore arrivé à 9 h1 0 alors que nous avions rendez-vous à 9 h. C’est la Xe fois que cela se produit cette semaine. »
Exprimer son émotion
Dans un deuxième temps, le manager décrira à son collaborateur ce qu’il ressent face à cette situation. « Il peut exprimer de la frustration, de l’agacement, de la colère. Il peut aussi suggérer les soucis causés par ces retards, avec des clients par exemple. » Exprimer ses émotions, en restant courtois, donne de la sincérité à la relation et permet au salarié de mesurer l’impact de ses actions.
Proposer des solutions
Il convient cependant de ne pas en rester là. Pour que le reproche soit constructif, il faut surtout dépasser le problème rencontré. S‘il s’agit d’une insuffisance professionnelle, la recherche de solutions est essentielle, via une formation, l’aide d’un collègue ou une adaptation du poste. « J’appelle cela l’opération reset, dit Aude Tixier. Si on poursuit avec l’exemple du retard, le collaborateur peut avoir de bonnes raisons, familiales ou matérielles. Dans ce cas, il suffira peut-être juste de s’adapter et de décaler certains entretiens. » Et si le collaborateur n’a pas d’excuse, il fera sans doute plus attention, à l’avenir, conscient des conséquences de ses actions.
Envisager les conséquences
La discussion se terminera en décrivant immédiatement toutes les retombées positives que les deux parties peuvent attendre des solutions mises en place. « Il faut exprimer sa satisfaction et montrer à l’autre combien chacun, l’entreprise en premier lieu, bénéficiera de ces changements. » Et, en filigrane, chacun comprendra aussi que le statu quo, a contrario, serait dommageable pour tous…