La transmission d’entreprise est une opération qui demande d’être bien préparée sur les plans administratif et fiscal, mais aussi sur le plan psychologique. Pour le cédant, le départ de l’entreprise signifie un changement d’activité, mais également de statut, notamment social. Un aspect loin d’être anodin.
Dans une transmission, des solutions peuvent toujours être trouvées aux problèmes techniques. Mais il est plus difficile de résoudre les difficultés liées aux aspects psychologiques et humains, pourtant au cœur de ces opérations.
Une étape psychologiquement délicate
Passer de la position de chef d’entreprise à celle de cédant peut en effet s’avérer très délicat pour le dirigeant. D’autant que peu anticipent réellement cet événement. Lorsque la transmission coïncide avec le départ à la retraite, cela suppose d’accepter de se projeter sur sa sortie du monde professionnel alors qu’il occupe une place centrale dans la vie des entrepreneurs. Céder son entreprise peut aussi signifier renoncer à un certain statut, une position sociale où le chef d’entreprise connaît les acteurs économiques locaux et est reconnu comme un employeur.
Transmettre, c’est aussi accepter de rompre le lien avec son entreprise que certains ont bâtie ex nihilo et que d’autres ont reçue en héritage, y consacrant beaucoup d’énergie et y sacrifiant parfois certains aspects de leur vie personnelle et familiale. Il en résulte parfois une crainte de dépossession, qui peut porter préjudice au processus de transmission. Notamment si, par exemple, le cédant cherche à négocier une transition déraisonnablement longue ou à conserver un regard sur ce qu’il adviendra de l’entreprise après son départ. Car, pour que la transmission aboutisse, il est nécessaire que le cédant accepte à un moment de passer le relais.
La part non négligeable de l’affect
Les difficultés sont d’autant plus susceptibles d’apparaître que l’affect joue pour beaucoup dans le lien entre les hommes et l’entreprise, comme dans le cadre des transmissions familiales. Une même configuration peut ainsi mener à des situations très différentes du fait des aspects psychologiques.
Prenons trois exemples, rapportés par une des expertes membres de France Défi. À chaque fois, la société a été créée par les grands-parents, qui ont donné l’entreprise à leurs deux enfants. Sur les quatre petits-enfants, un seul y travaille. Dans le premier cas, la transmission se passe bien parce que les choses ont été posées et préparées douze ans en amont. Dans le deuxième, le petit-fils a annoncé en assemblée générale qu’il souhaitait reprendre l’entreprise et racheter toutes les parts sans en avoir parlé au préalable. Son oncle ne voit pas comment lui vendre ses parts. Ce frein psychologique devrait être levé au fil du temps parce qu’il aura la volonté de permettre à son neveu de poursuivre l’histoire familiale. Dans le troisième cas, le blocage est en revanche complet parce que l’oncle donne une valeur financièrement disproportionnée à ses parts, qui correspond en fait une valeur affective.
Anticiper et communiquer
Pour dépasser ces freins psychologiques, l’anticipation et la communication sont primordiales. Aux côtés du chef d’entreprise, l’expert-comptable, qui l’accompagne au quotidien, peut l’aider à se préparer. C’est ainsi son rôle que d’évoquer très tôt les sujets susceptibles de générer des blocages et d’aider les parties prenantes à mûrir leur réflexion tout en désamorçant les inquiétudes et les tensions.