La Cour de cassation a récemment rappelé qu’une période d’essai n’était pas forcément justifiée si l’entreprise avait déjà pu apprécier les compétences d’une personne, même dans un autre cadre que le salariat.
Salarié ou prestataire ? Pour une entreprise, la question se pose parfois de la forme à travers laquelle s’adjoindre les compétences d’une personne. Cette décision doit être bien réfléchie, car externaliser ou embaucher n’est pas la même chose. Si ses inspecteurs décèlent un lien de subordination entre l’entreprise et un de ses prestataires, l’Urssaf peut requalifier la relation en contrat de travail.
Cependant, il arrive qu’une entreprise décide d’elle-même d’embaucher sous un contrat de travail une personne qui intervenait auparavant pour elle comme prestataire. Cet enchaînement a des conséquences s’agissant notamment de la période d’essai pouvant être envisagée à l’embauche, qui n’est pas justifiée si l’employeur a déjà pu jauger les compétences de sa nouvelle recrue, comme l’a récemment rappelé la Cour de Cassation dans un arrêt du 29 avril 2025.
Auto-entrepreneure puis salariée
Elle s’est penchée sur une affaire qui opposait une salariée à l’entreprise qui l’avait recrutée comme agenceuse-vendeuse en CDI avec une période d’essai de deux mois. L’entreprise avait mis un terme à cette période d’essai au bout d’un mois et demi. Mais la vendeuse avait contesté cette rupture devant les prud’hommes estimant que la période d’essai n’avait pas de raison d’être, ses compétences ayant déjà pu être évaluées par son employeur à l’occasion d’une mission d’agent commercial qu’elle avait précédemment réalisée pendant dix mois en tant qu’auto-entrepreneure.
Les prud’hommes et la cour d’appel ont d’abord estimé que cette prestation ne permettait pas de juger de ses aptitudes comme salariée et que la période d’essai était bien valable dès lors que la vendeuse n’avait pas été précédemment liée à l’entreprise par un contrat de travail.
Peu importe la forme de la relation de travail précédente
La Cour de Cassation leur a donné tort. Elle rappelle que, selon le code du travail, « la période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent ».
La haute juridiction précise ensuite que pour fonder sa décision, la cour d’appel aurait dû chercher à savoir « si l’employeur n’avait pas eu l’occasion d’apprécier les aptitudes professionnelles de la salariée lors de la précédente relation de travail, quelle qu’en soit la forme ». Autrement dit le fait que la collaboration précédente entre cette vendeuse et l’entreprise n’ait pas eu lieu sous la forme d’un contrat de travail ne veut pas dire qu’elle n’a pas permis d’évaluer ses compétences. L’affaire doit donc être rejugée.
Jurisprudence confirmée
La Cour de Cassation avait déjà pris une décision en ce sens, dans une affaire datant de 2015. Elle avait alors confirmé la décision d’une cour d’appel estimant qu’une entreprise ne pouvait prévoir de période d’essai pour un agent commercial recruté comme salarié après avoir exercé les mêmes fonctions comme travailleur indépendant. La nouvelle décision confirme donc le message précédemment adressé aux employeurs.