Depuis 2014, la loi prévoit que les entreprises tiennent compte de « l’impact différencié de l’exposition au risque en fonction du sexe », dans leur évaluation des risques professionnels. Or, « cette dimension de l’évaluation des risques a peu été mise en œuvre », constate l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) qui publie un guide pour outiller les entreprises dans cette démarche.
Son principal intérêt réside dans une première partie rappelant les raisons qui justifient d’adopter une telle démarche alors que les accidents de travail augmentent chez les femmes et que la hausse des maladies professionnelles les frappant est plus importante que pour les hommes. Il s’agit d’aboutir à une évaluation des risques « au plus près des situations de travail ». Celle-ci doit donc d’une part tenir compte des écarts d’exposition aux risques entre les hommes et les femmes et d’autre part de l’impact différent que ces expositions peuvent avoir selon le sexe des salariés concernés.
Des réalités de travail différentes
« La réalité du travail des femmes et des hommes n’est pas la même compte tenu des métiers et parcours différents mais aussi des activités hors travail », rappelle ainsi l’Anact. Non seulement, les hommes et les femmes n’occupent souvent pas les mêmes postes, mais à poste équivalent leurs tâches peuvent être différentes et les perspectives d’évolution sont souvent moindres pour les femmes. Cela conduit à des risques différents.
Globalement, les femmes sont ainsi plus exposées au travail répétitif ou nécessitant une station debout prolongée mais aussi aux violences sexistes et sexuelles. Les hommes, eux, sont plus concernés par la manutention de charges lourdes. En outre, une exposition à un même risque peut générer des effets différents sur la santé des salariés selon leur sexe, du fait des différences sociales et biologiques entre hommes et femmes.
Une sensibilisation préalable bienvenue
Pour ne pas les négliger, l’Anact expose en deuxième partie du guide une démarche d’évaluation en 5 phases. Avec, à chaque étape, des recommandations pour s’inscrire dans cette approche sexuée. Il ne s’agit pas de construire deux évaluations distinctes, l’une pour les hommes, l’autre pour les femmes, mais bien d’intégrer cette question au processus permettant d’aboutir à la rédaction du document unique d’évaluation des risques professionnels (Duerp). Cela suppose par exemple de « prévoir autant que possible des groupes de travail et de participations mixtes », pour le pilotage et la mise en œuvre de la démarche. Une sensibilisation préalable des participants aux enjeux de l’égalité professionnelle et à l’intérêt de l’approche sexuée doit aussi être envisagée.
Données sexuées et fiches pratiques
Pour préparer le travail d’évaluation des risques, le guide recommande de récolter et d’analyser d’abord des données sexuées sur la population de travail (effectif, ancienneté, répartition, nombre d’accidents du travail et de maladies professionnelles, statut, turnover, etc.…). Une liste des données à mobiliser est fournie ainsi que les ressources pour les trouver.
S’agissant de la phase de recensement et de l’évaluation des risques en tant que telle, l’Anact rappelle tout d’abord l’importance de faire participer les salariés des unités de travail concernées. Pour tenir compte des différences d’exposition et d’impact, elle propose des fiches pratiques avec des repères par famille de contraintes de travail et de risques et les questions à se poser pour identifier les écarts potentiels entre hommes et femmes. Il s’agit par exemple de se demander si le matériel ou les équipements de protection sont adaptés à toutes les morphologies ou s’il y a des inégalités dans la construction des parcours en interne.
Des actions de prévention à mettre en place
Les horaires et cycles de travail peuvent aussi être interrogés quant à leur impact différent sur les travailleurs et travailleuses. Le travail de nuit est, par exemple, reconnu comme un facteur de risque probable du cancer du sein. Il importe aussi de se demander si les situations de travail analysées exposent à la survenue de violences sexistes et sexuelles.
Le guide fournit également un exemple de formalisation du Duerp et des recommandations pour définir les actions de prévention sur lesquelles l’évaluation des risques doit déboucher.