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Confidentialité de l’adresse des dirigeants : comment ça marche ?

Publié le jeudi 23 octobre 2025 à 14h04
Par Marion Perrier, Accroche-press’ pour France Défi
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La mesure sur la confidentialité de l’adresse des dirigeants récemment mise en place constitue un premier pas pour limiter les risques liés à la diffusion de cette donnée personnelle. Mais elle reste limitée.

Le décret permettant la confidentialité de l’adresse personnelle des dirigeants d’entreprise a été publié le 22 août 2025. Il répond à une inquiétude soulevée depuis quelques mois alors que plusieurs entrepreneurs du secteur des cryptomonnaies ont fait l’objet d’enlèvements ou de tentatives d’enlèvement. « En réalité, cela répond à plusieurs enjeux et s’inscrit dans la continuité des mesures du règlement RGPD sur la protection des données personnelles », analyse Alice Bertrand, directrice associée du service juridique chez Valexco, membre de France Défi.

 

« Jusqu’ici, l’adresse personnelle des dirigeants était très facilement accessible puisque mentionnée sur les extraits RNE, sur le registre des bénéficiaires effectifs ou sur le registre du commerce et des sociétés et les extraits Kbis par exemple », poursuit-elle. Avec internet et l’intelligence artificielle, cette réalité contribue à exposer les dirigeants d’entreprises à de nombreux risques : l’enlèvement, en vue d’une demande de rançon, mais aussi plus simplement l’usurpation d’identité ou le harcèlement.

Une confidentialité à demander

Désormais, il est donc possible d’obtenir l’occultation de cette adresse. À condition, toutefois, d’en faire la demande. « La confidentialité n’est pas automatique, ce qui est un peu dommage », pointe la juriste en rappelant que la mesure ne concerne qu’un petit nombre de personnes. Sont ciblés les personnes physiques, les représentants légaux de sociétés et les associés indéfiniment responsables.

Ils doivent effectuer leur demande auprès du guichet unique des entreprises de l’Inpi. Cette demande peut s’effectuer à l’occasion d’une formalité ou à tout moment et doit être traitée par le tribunal de commerce dans un délai de cinq jours francs ouvrables après sa réception. Pour solliciter la confidentialité de son adresse sur le Kbis afin qu’elle ne figure plus sur l’extrait communiqué au public, la démarche coûte environ 54 euros.

Elle va dans le bon sens mais, étant donné ses limites, la lourdeur administrative et le coût de sa mise en œuvre, un certain nombre de chefs d’entreprise ne se lanceront sans doute pas dans cette démarche.

Alice Bertrand

« Mais si vous souhaitez également demander la confidentialité de cette adresse sur les actes déposés au registre du commerce, il faut envoyer pour chaque acte un exemplaire avec l’adresse occultée et compter environ 7 euros à chaque fois », explique Alice Bertrand. Lors de l’enregistrement d’un nouvel acte, il faudra en déposer la version complète puis celle avec l’adresse masquée. Un travail considérable sera donc nécessaire pour s’assurer de la confidentialité effective de son adresse personnelle.

De nombreuses limites à la confidentialité

Et celle-ci demeurera limitée, d’abord parce que de nombreux professionnels – comme les notaires -, des entités et des administrations – telles les douanes – mais aussi les créanciers ou les associés du dirigeant continuent de pouvoir accéder à cette information. « Elle figurera par ailleurs toujours dans les annonces légales qui doivent accompagner certains actes, et dans le registre des bénéficiaires effectifs. En outre, les dirigeants sont aussi souvent associés de leur entreprise et verront leur adresse figurer dans certains documents à ce titre. De nombreux sièges sociaux sont également domiciliés à l’adresse personnelle des chefs d’entreprise », poursuit la directrice du service juridique. Les anciens dirigeants ne sont par ailleurs pas concernés par la mesure.

Une évolution possible

« Elle va dans le bon sens mais, étant donné ses limites, la lourdeur administrative et le coût de sa mise en œuvre, un certain nombre de chefs d’entreprise ne se lanceront sans doute pas dans cette démarche », prévoit Alice Bertrand tout en imaginant que cette première mesure est amenée à évoluer. « Toute la difficulté réside dans le difficile équilibre à trouver entre la protection des informations personnelles des dirigeants et la sécurité de la vie économique », résume la juriste.