L’année 2025, placée sous le signe de la santé mentale, est l’occasion pour les entreprises de renforcer leurs actions de prévention des risques psychosociaux.
Alors que la santé mentale a été désignée Grande cause nationale pour 2025, une part importante des salariés français présente des signes de mal-être psychologique. Selon le dernier baromètre du cabinet Empreinte humaine, réalisé avec Opinionway auprès d’un échantillon représentatif de 2 030 personnes, 13 % des répondants présentent une détresse psychologique élevée, combinant symptômes dépressifs et épuisement professionnel. Pour la plateforme de prévention en santé mentale Teale, qui réalise un baromètre sur un échantillon plus large (10 000 personnes), 20 % des participants seraient à risque de dépression et 37 % estiment que leur niveau de stress au travail dépasse un seuil acceptable.
Comme le souligne le psychologue et consultant Simon Brossard, invité du podcast d’Experts et décideurs, il est temps de rompre avec le déni qui entoure encore trop souvent les risques psychosociaux (RPS). D’autant plus que ces derniers ont un impact majeur pour la collectivité et pour les entreprises.
Première cause des arrêts maladie de longue durée
Les troubles psychiques sont aujourd’hui la première cause des arrêts maladie de longue durée. Ils constituent également le premier poste de dépenses de l’Assurance maladie, avec 23,3 milliards d’euros remboursés au titre de la souffrance psychique et des pathologies psychiatriques. En y ajoutant les coûts indirects – perte de qualité de vie, baisse de revenus, périodes d’inactivité, invalidité et réduction de l’espérance de vie –, le coût global pour la société s’élèverait à 163 milliards d’euros. Au niveau des employeurs, Teale évalue à 3 800 euros par an et par collaborateur le coût de l’absentéisme et du turnover liés à la santé mentale.
En matière de RPS, les entreprises sont tout d’abord soumises à une obligation légale : elles doivent les évaluer et mettre en place des actions de prévention. Mais au-delà du cadre réglementaire, elles ont tout intérêt à inscrire la santé mentale de leurs salariés au cœur de leur stratégie, le bien-être au travail étant un levier essentiel de performance. Le baromètre de Teale met par exemple en évidence « une corrélation entre dégradation de la santé mentale, difficultés à gérer le stress, baisse de motivation et baisse de productivité ».
Une corrélation importante avec la performance de l’entreprise
À l’échelle mondiale, une étude menée par la plateforme de recrutement Indeed en collaboration avec le Centre de recherche sur le bien-être de l’université d’Oxford montre également une « très forte corrélation » entre la performance financière d’une entreprise et le niveau de bien-être de ses salariés. Selon Teale, une stratégie « solide » en matière de santé mentale peut générer un retour sur investissement de 4,4 euros pour chaque euro investi.
La protection de la santé mentale des salariés commence par l’instauration de bonnes conditions de travail. C’est le socle de toute démarche en santé au travail, comme le rappelle Vincent Baud, conférencier et professeur associé en management à l’université d’Aix-Marseille grâce à un schéma en forme de pyramide. Sur cette base, les entreprises peuvent ensuite déployer des actions de prévention sur trois niveaux : primaire (anticipation des RPS), secondaire (sensibilisation) et tertiaire (accompagnement des salariés en difficulté). Pour être efficaces, ces dispositifs doivent s’appuyer sur des évaluations régulières de l’état de santé mentale des collaborateurs, de leur qualité de vie et de leur bien-être au travail. Cela permet d’ajuster les plans d’action, en tenant compte du ressenti des équipes. Car la perception des salariés est souvent en décalage avec celle des responsables des ressources humaines, comme le montre le baromètre d’Empreinte humaine.
Des managers au centre des actions
Cette étude met également en lumière le rôle central des managers dans l’identification des signaux de mal-être au sein des équipes. Six sur dix affirment ainsi que les risques psychosociaux et les problèmes de santé mentale occupent une part croissante de leur temps au quotidien. Alors qu’ils doivent aussi créer un bon climat de travail, beaucoup se retrouvent confrontés à une forme d’injonction paradoxale : devoir à la fois atteindre les objectifs fixés et prévenir le stress au travail. « Pour faire face à la gestion des problématiques personnelles des collaborateurs, il est essentiel que les directions soutiennent les populations RH et managers, de plus en plus sollicitées et exposées, afin de les protéger de la détresse psychologique », souligne le cabinet Empreinte humaine.
Des dirigeants sévèrement touchés
Enfin, les dirigeants ne doivent pas s’oublier, car ils ne sont pas épargnés par les problèmes de santé mentale. Selon une étude de la fondation d’entreprise MMA des Entrepreneurs du futur, environ un quart des dirigeants jugent leur état psychologique passable ou mauvais. Une proportion qui monte même à 40 % chez les dirigeants d’entreprises dites à impact, selon les données de Ticket for change. Souvent qualifiée de premier capital immatériel de l’entreprise, la santé du dirigeant constitue un véritable enjeu stratégique. Qu’il s’agisse de mieux gérer la surcharge mentale, de consulter un professionnel, ou encore de s’appuyer sur des réseaux de pairs, plusieurs leviers existent pour préserver son équilibre psychologique et prévenir l’épuisement.