La Cour de cassation a consacré le droit au report des congés payés en cas d’arrêt maladie, conformément à la jurisprudence européenne.
Un salarié placé en arrêt maladie pendant un congé payé a-t-il droit au report de ses jours de vacances ? C’est la question qui a été posée à la Cour de cassation dans le cadre d’une affaire opposant une entreprise réclamant un trop perçu d’indemnité de congé payé à une salariée. La plus haute juridiction judiciaire de France a répondu par l’affirmative, mettant ainsi le droit français en conformité avec le droit européen. Dans son arrêt du 10 septembre 2025, elle s’appuie sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), qui distingue clairement deux droits : celui aux congés annuels payés, dont l’objectif est de permettre au travailleur de se reposer, de se détendre et de bénéficier d’un temps de loisirs, et celui au congé de maladie, destiné à se rétablir d’un problème de santé.
Notification obligatoire
Puisque les deux droits ne poursuivent pas le même objectif, la Cour de cassation considère qu’un salarié placé en arrêt maladie durant ses congés payés doit pouvoir en demander le report. Cela est valable à condition que l’arrêt maladie soit notifié par le salarié à son employeur, précise-t-elle.
Jusqu’alors, le report n’était envisageable que lorsque l’arrêt maladie survenait avant le début des vacances. Cet arrêt intervient un an et demi après la loi du 22 avril 2024 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne (DDADUE). Ce texte a introduit dans le code du travail les apports d’une jurisprudence de la Cour de cassation rendue en septembre 2023. À cette occasion, la juridiction avait jugé qu’un salarié en arrêt maladie continuait d’acquérir des droits à congés payés pendant la durée de son arrêt, même lorsque celui-ci n’était pas d’origine professionnelle.
Quel impact pour les entreprises ?
Cette nouvelle mise en conformité du droit français avec les règles européennes en matière de congés payés a été mal reçue par les organisations patronales. La Cour de Cassation vient « ajouter une couche à un droit français déjà plus que complexe en s’abritant derrière le droit européen qui, décidément, ne recule devant rien pour pénaliser les entreprises », a déclaré la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) dans un communiqué. « Au-delà des coûts induits par ces décisions aberrantes, se pose la question plus large de la notion même de travail et de sa valeur. Un salarié présent à son poste mérite-t-il davantage qu’un absent ? C’était la règle. Ça ne l’est plus et cela représente une formidable injustice », estime-t-elle.
Reste à mesurer l’impact concret de ce droit au report des congés payés, qui était déjà appliqué en France par certaines conventions collectives (personnels des cabinets médicaux, aides à domicile, missions locales…). En Belgique, la mise en conformité du droit national avec le droit européen n’a pas eu de répercussions sur les entreprises, rapporte La Croix. « Aucun des employeurs avec qui je travaille n’a constaté d’abus ou un changement dans la manière dont les travailleurs prennent leurs congés (ou tombent malades !) », a ainsi assuré l’avocate Hélène Djaoudi, associée au sein du cabinet Moov.law, interrogée par le quotidien.