Forme de justice privée, l’arbitrage permet de faire trancher les différends dans un délai maîtrisé et en toute confidentialité.
Longtemps perçu comme étant l’apanage de grandes multinationales, le recours à l’arbitrage par des entreprises de taille plus modeste n’est aujourd’hui pas rare. « Il s’agit d’un mode privé de règlement des différends, alternatif à la justice d’État », explique Ilène Choukri, associée au cabinet Caprioli & Associés. Le litige est soumis à la juridiction d’un tiers désigné par les parties, l’arbitre ou le tribunal arbitral lorsqu’ils sont plusieurs.
Un large champ d’application
« Contrairement à la médiation où l’objectif est d’essayer de faire converger les intérêts des parties pour trouver une solution amiable, l’arbitre est là pour trancher le litige et se prononcer sur le bien-fondé des droits de chacun. Il rend, à la fin du processus, une décision, la sentence arbitrale, qui a les mêmes attributs et les mêmes prérogatives qu’une décision judiciaire rendue par un tribunal », développe l’avocate, également membre du conseil d’administration de la Chambre arbitrale internationale de Paris. Cela vaut, précise-t-elle, sous réserve d’obtenir une ordonnance d’exequatur auprès du juge étatique pour donner force exécutoire à cette sentence dans les cas où il faudrait en forcer l’exécution.
Loin d’être cantonné au droit du commerce international, le champ d’application de ce mode de résolution des litiges est large. « Tout ce qui touche au monde des affaires est théoriquement arbitrable », résume l’avocate. Les litiges touchant à l’ordre public, relevant du droit du travail, du droit pénal ou du droit à la consommation en sont en revanche exclus.
Clause compromissoire
L’arbitrage peut être prévu par une clause compromissoire au sein du contrat liant les deux parties ou être décidé par elles lorsque le litige survient. « Il est préférable que cela soit prévu au contrat car sinon elles peuvent mettre du temps à se mettre d’accord sur les modalités de l’arbitrage, la désignation des arbitres », conseille Ilène Choukri, en constatant qu’une fois un litige cristallisé, le climat n’est pas forcément propice à ce que les parties s’entendent sur les détails de leur procès.
Les principes cardinaux applicables au procès judiciaire, comme le respect du contradictoire et de l’égalité des armes, le sont aussi à la procédure d’arbitrage.
Si son déroulé peut varier d’un centre d’arbitrage à l’autre, il s’apparente à celui d’une procédure judiciaire : une requête est déposée, des écritures et des pièces échangées, des mesures provisoires ordonnées, des expertises éventuellement réalisées, une audience a lieu, suivie du délibéré. « Les principes cardinaux applicables au procès judiciaire, comme le respect du contradictoire et de l’égalité des armes, le sont aussi à la procédure d’arbitrage », précise l’avocate.
De plus en plus d’entreprises, y compris des PME, ont recours à l’arbitrage, qui revêt plusieurs atouts. « Son premier avantage réside dans la confidentialité qu’il garantit. A contrario, en utilisant la voie judiciaire, les entreprises s’exposent à un préjudice d’image, les audiences et les décisions étant publiques », relève Ilène Choukri. L’autre intérêt est d’aboutir rapidement à une sentence. « À la Chambre arbitrale internationale de Paris, les délais vont en général de 4 à 6 mois, un an lorsqu’il y a de grosses difficultés », illustre la spécialiste. Elle ajoute que les centres proposent aujourd’hui la possibilité d’obtenir des décisions en référé, donc très rapidement.
Une décision respectée
Enfin, les arbitres, qui peuvent être d’anciens magistrats, des professeurs d’université ou des dirigeants d’entreprise par exemple, sont choisis pour leur connaissance des spécificités des usages professionnels, leur expertise et leur intégrité, afin de garantir une indépendance équivalente à celle d’un magistrat professionnel. « Normalement, dans un collège d’arbitres, vous aurez un professionnel du domaine du litige. Le fait que la décision soit rendue par des personnes qui ont une expérience opérationnelle sur le sujet joue sur le niveau d’adhésion à cette sentence des parties, qui en général s’y plient », constate l’avocate.
Le coût de l’arbitrage peut toutefois être comme un frein à son utilisation. « Cela peut sembler cher au départ puisque vous pouvez avoir un droit d’entrée de 3 000 euros par exemple, auxquels s’ajoutent les honoraires des arbitres, les frais de procédure et d’avocat », explique Ilène Choukri. Ces frais sont consultables sur les sites des centres d’arbitrage. « Mais cela peut finalement coûter moins cher qu’une procédure judiciaire qui s’étale sur des années avec des coûts qui s’accumulent », pointe Ilène Choukri tout en soulignant que l’impécuniosité d’une des parties peut effectivement entraver le recours à l’arbitrage.


